Germaine et Jean-Fabien Lechardoy
Extraits
Deux répertoires entremêlés : celui de l'Armée et celui des danses basques
Germaine Lechardoy se rappelle les dires de son père concernant le mélange des pas appris à l’armée avec ceux des danses traditionnelles. Elle raconte que dans ce que l’on appelle aujourd’hui "danse basque", il y a de nombreux pas issus des danses de l’armée. Son père et ceux de sa génération ont adapté aux danses locales les pas appris à l’armée. Par exemple, dans des danses comme Satan ou Lagabota (la Gavotte).
Germaine et Jean-Fabien Lechardoy. Collecte "Eleketa". 2013 © Département des Pyrénées-Atlantiques – Archives départementales - 19AV1018
L'enseignement de Marti Heguiaphal
Germaine Lechardoy parle du professeur de danse Marti Heguiaphal et de l’enseignement qu’il prodigua à son père. C’est pendant les fenaisons que Marti faisait danser son fils et le père de Germaine. Pendant les pauses, au lieu de rester à l’ombre, ils devaient donner des danses. C’est ainsi qu’ils prirent goût à la danse, poussés par Marti Heguiaphal.
Germaine et Jean-Fabien Lechardoy. Collecte "Eleketa". 2013 © Département des Pyrénées-Atlantiques - Archives départementales - 19AV1018
La première femme à participer aux mascarades (1946)
Germaine Lechardoy parle de sa participation aux mascarades de Barcus en 1946. Avec sa sœur et la fille ou la nièce de chez Xuhit, elles composaient la suite. Son père et Alexis Xuhit leur ayant appris à danser avant et pendant la guerre, ils décidèrent de les faire participer à la mascarade en leur faisant donner les quadrilles et les sauts. Elles furent critiquées par quelques femmes mariées du village qui leur disaient que les filles ne pouvaient se mélanger ainsi aux garçons. Germaine raconte qu’elles avaient honte mais comme c’était leur père qui avait décidé de les faire participer à la mascarade, personne ne pouvait s’y opposer.
Germaine et Jean-Fabien Lechardoy. Programme "Eleketa". 2013 © Archives départementales des Pyrénées-Atlantiques - 19AV1021
Les femmes ont sauvé la danse en Soule
Jean-Fabien Lechardoy fait remarquer que si les femmes n’avaient pas appris à danser, la danse souletine aurait sûrement disparu aujourd’hui. Même s’il existe des différences entre filles et garçons, notamment au niveau de la puissance, il compare cela aux différences de styles entre villages. Il souligne par contre que la perte de qualité en danse n’est pas due à la présence des filles mais bien au manque de travail des jeunes danseurs(ses).
Germaine et Jean-Fabien Lechardoy. Collecte "Eleketa". 2013 © Archives départementales des Pyrénées-Atlantiques - 19AV1032
Prise de conscience de l'identité grâce à l'abbé Bidegain
Jean-Fabien Lechardoy cite l’abbé Bidegain qui fit prendre conscience, à tous les jeunes de sa génération, de la culture et de la langue basques. Il précise que l’instituteur punissait les enfants s'exprimant en basque en les mettant à genoux sur des grains de maïs. Le curé faisait de même lorsque les enfants parlaient en français. Selon Jean-Fabien, finalement, le seul point commun au curé et à l’instituteur était l'usage des grains de maïs.
Germaine eta Jean-Fabien Lechardoy. Collecte "Eleketa". 2013 © Département des Pyrénées-Atlantiques - Archives départementales - 19AV1045
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Germaine Uthürry, épouse Lechardoy, née en 1926 à Barcus, à la maison Ütürria, est issue d'une famille de danseurs. Les quatre enfants de la famille (deux garçons, deux filles) suivent, l'hiver, l'exigente formation que leur prodigue leur père. Celui-ci, danseur réputé, enseigne la danse à de nombreux jeunes du quartier de la Chapelle où il vit dans sa ferme. Après la guerre de 1939-1945, impulsée par son père, elle danse à la mascarade sous l'oeil réprobateur des femmes du village. Germaine se marie en 1951 avec Beñat Lechardoy qui tient un café-restaurant faisant office de boucherie charcuterie à Barcus. Sa vie se déroule, au travail, au contact des villageois et au fil des fêtes. Bien qu'à l'époque la femme n'apparaisse pas sur la place publique, celle-ci au foyer est l'élément moteur de la transmission du chant.
Son fils Jean-Fabien est né en 1952. Après avoir été à l'école de Barcus, il poursuit ses études au collège Saint-François de Mauléon, puis devient apprenti boucher-charcutier à Oloron. Après avoir exercé toute sa vie à la boucherie-charcuterie familiale, il est aujourd'hui à la retraite.
À vingt ans, il apprend les pas de danse auprès de ses oncles Alexis Üthürry "Larranda" et Jean-Pierre Üthürry "Artaguiet", et de son grand-père, accompagné du txülülari Alexis Picotchet. Le groupe de cinq danseurs issu de cette formation prend part à la pastorale Etxahun Barkoxe deux ans plus tard, en 1974, et fonctionne ainsi pendant 7 à 8 ans.
Jean-Fabien enseigne la danse pendant quinze ans. Il s'implique dans la vie culturelle de Barcus à travers les mascarades, les diverses sorties en groupe, les pastorales, dans l'association culturelle Etxahun et depuis 1998, comme errejent(metteur en scène) de pastorale.
En transmettant son savoir, il participe à la continuité et au renouvellement des pratiques culturelles qui unissent les souletins.