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Betti Bidart et Marcel Haristoy

Betti Bidart et Marcel Haristoy

Extraits

Prise de conscience de l’identité basque et recherche des sources

A partir des années 1970, l’évolution des groupes de danse suit celle de la société, notamment la situation sociopolitique basque. La danse, élément de la culture basque, prend toute sa signification. Certains expriment leur basquitude à travers elle. D’autre part, au fur et à mesure que les groupes gagnent en qualité, ils s’aperçoivent que les danses interprétées sont en fait "un mix", à l’exemple de la danse "Otsagabia" donnée à Saint-Etienne-de-Baïgorry et Saint-Jean-Pied-de-Port. Ils décident alors d’effectuer des recherches sur les origines de ces danses.

Betti Bidart – Marcel Haristoy. Collecte "Eleketa". 2012 © Département des Pyrénées-Atlantiques - Archives départementales - 19AV134

Le devenir des instruments traditionnels

Les instruments traditionnels comme le txistu, la gaita ou le trikititxa sont aujourd’hui mis à mal : ils ont une place à reconquérir dans leur lieu de prédilection qu’est la rue. Betti Bidart nous dit qu'il y a eu de nombreux élèves de txistu, des centaines d'élèves sont passés par le conservatoire de Bayonne. Où sont-ils maintenant ? Personne n'a travaillé la place du txistu, comment l'améliorer, que faire... Certains ont voulu amener le txistu au plus haut niveau, vers le classique... La technique du txistu a changé et lui-même, en tant qu'instrument, s'est transformé. On a trop voulu amener le txistu de la rue vers la scène. Et il a perdu son lien avec la rue. Il y a bien des gens comme Gari Mendizabal ou Ansorena, mais en dehors de cela, que faire ? Des spectacles ? Des concerts de txistu ? C'est difficile. classique... La technique du txistu a changé et lui-même, en tant qu'instrument, s'est transformé. On a trop voulu amener le txistu de la rue vers la scène. Et il a perdu son lien avec la rue. Il y a bien des gens comme Gari Mendizabal ou Ansorena, mais en dehors de cela, que faire ? Des spectacles ? Des concerts de txistu ? C'est difficile. Cela n'empêche pas que les musiciens donnent des concerts pour leur propre plaisir, avec un orchestre, et que cela plaise beaucoup au public. De plus, tout est en train de changer. Ils ont connu "l'époque glorieuse", avec 200-300 personnes autour d'eux, où les gens les suivaient, où il leur suffisait de jouer pour que les gens dansent. Mais maintenant, les gens ne vont plus vers la musique. Quand ils jouent en dehors des cérémonies officielles, ils pensent parfois : "On dérange les gens ou quoi ?" Maintenant, pour les joueurs de txistu, de gaita, de triki, et bientôt pour les txaranga, la question suivante se pose : "Où est notre place ?" Il faut réfléchir, penser où jouer, des manières différentes... La vraie place des instruments traditionnels est la rue et il faut beaucoup travailler cet aspect.

Betti Bidart - Marcel Haristoy. Programme "Eleketa". 2012 © Archives départementales des Pyrénées-Atlantiques - 19AV126

Premières générations de txistulari en Pays Basque nord

L’influence de Segundo Olaeta et des réfugiés du Pays Basque sud a été majeure en Pays basque nord dans le domaine de la danse mais aussi de la musique. Grâce à eux, on enseignait la danse et le txistu au groupe de danse Olaeta (qui deviendra ensuite Oldarra et Etorki). Le kanboar Michel Labèguerie a été l’un des premiers joueurs de txistu avec le baigorriar Jean Hillau à y être formés. À l’époque, le txistu était le seul instrument de musique enseigné.

Betti Bidart, Marcel Haristoy. Programme "Eleketa". 2012 © Archives départementales des Pyrénées-Atlantiques - 19AV130

L’orchestre Ramuntxo et les sauts basques

L’orchestre Ramuntxo a contribué à perpétuer la tradition des sauts basques en Pays Basque intérieur et en Basse-Navarre notamment, dès les années 1950 et ce, pendant une trentaine d’années. La formation musicale de très bonne qualité, ayant conservé une manière de jouer traditionnelle, a publié quelques disques. Ils ont grâce à leur travail, ouvert la voie aux musiciens des nouvelles générations.

Betti Bidart, Marcel Haristoy. Programme "Eleketa". 2012 © Archives départementales des Pyrénées-Atlantiques - 19AV112

"Arrola" renoue avec les sauts basques et le répertoire bas-navarrais

Suite au succès des toberak (parade charivarique) de 1972, le groupe de danse Arrola de Saint-Etienne-de-Baigorry décide de se réapproprier le répertoire bas-navarrais et notamment les sauts basques. Jusqu’alors, leurs spectacles présentaient des danses de tout le Pays Basque et les danses locales n’avaient qu’une petite place. En 1973, avec ce répertoire réapproprié, ils commencent à se produire en Pays Basque sud, notamment en Navarre, et à tisser des liens étroits avec les groupes de danses mais aussi avec les joueurs de gaita.

Betti Bidart - Marcel Haristoy. Programme "Eleketa". 2012 © Archives départementales des Pyrénées-Atlantiques - 19AV146

En savoir plus

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Marcel Haristoy fait partie de la génération qui a intégré Arrola à la fin des années 1960, lorsque Jamattit Bidart dit Kuxkurrio a décidé de redonner véritablement corps au groupe de danse (qui avait déjà existé de 1942 à 1946). Né en 1950, Marcel a commencé à apprendre à danser à l'école libre des garçons (Bil Etxea), dès 1960, avec Jean Nesprias. Celui-ci enseignait aussi la danse aux filles, scolarisées chez les religieuses. Marcel se souvient que l'apprentissage de la danse à Saint-Etienne-de-Baïgorry avait démarré peu avant (les plus âgés avaient cinq ans de plus que lui). Tous les élèves de Jean Nesprias dansaient à l'occasion de la fête scolaire, à la kermesse du village et le 15 août. L'activité de ce groupe demeurant sporadique, Marcel fut dès 1966 demandé comme danseur par le groupe Orok Bat de Jean Nesprias, puis par Garaztarrak (abbé Oxarango). En 1969, avec une dizaine d'autres baigorriar dansant à Garaztarrak, il décide d'intégrer la formation Arrola que Jamattitt Bidart vient de redémarrer. Il y dansera régulièrement jusqu'au début des années 1980 (mariage en 1977), puis occasionnellement jusqu'à ce jour. Ses deux filles y dansent également.

Betti Bidart, né en 1954, a commencé à apprendre le txistu dès l'âge de 7 ans, avec un jeune homme du village (Peio Curutcharry), plus âgé que lui d'une dizaine d'années et élève de Jean Nesprias, celui-ci venant complèter cet enseignement une à deux fois dans le mois. A partir de 1967, il aura comme maître Mattin Zubieta qui l'initiera également au solfège. A partir de 1970, il intégrera les cours de txistu du Conservatoire de Musique de Bayonne, sous l'égide d'Iñaki Urtizberea. Betti sera musicien au sein du groupe Garaztarrak (de 1967 à 1969) puis entrera à Arrola où il joue encore aujourd'hui.

En 1972, il apprend à jouer de la gaita avec des amis navarrais et sera de ceux qui introduiront cet instrument en Pays Basque nord. Etant txistulari et gaitero, Betti Bidart a participé à de nombreuses sorties et tournées de groupe (dont Garaztarrak , Oldarra, Etorki). Ses deux enfants font aujourd'hui partie d'Arrola, le fils comme musicien, la fille comme danseuse.

Les deux témoignages sont complémentaires, celui de Marcel Haristoy retrace l'itinéraire d'un danseur de village amoureux de la danse et de ses racines, le musicien Betti Bidart apporte une dimension plus historique et globale en insérant son parcours d'artiste (txistulari et gaitero) dans le contexte social, culturel et politique de l'époque.

Pour tous les deux, amour et transmission de la danse et de la musique sont des maîtres mots.