Berria

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"Dossier Culture et langue basque" - Lettres d'Aquitaine  - Publication de l'Agence Régionale pour l'Ecrit et le Livre en Aquitaine 

Berria est le seul quotidien publié entièrement en basque. Sa ligne éditoriale est ouverte au monde et résolument contemporaine. Son existence, si elle na pas été sans embûche, prouve qu'un quotidien de qualité en langue basque peut vivre. La véritable histoire de Berria a démarré en 1990, lorsque le journal Egunkaria (« Quotidien » en basque) voit le jour.

Après treize années de parution, le titre est interdit en février 2003 par un juge espagnol sous prétexte qu'il aurait des liens avec ETA. 150 personnes se retrouvent alors sans emploi. Une équipe se constitue et, grâce aux financements de plusieurs entreprises du Pays basque, elle construit un autre projet. Il sera baptisé Berria (« La nouvelle »).

Aujourd'hui, les ventes de Berria s'élèvent entre 20 000 et 25 000 exemplaires dont 500 à 600 exemplaires sont diffusés en Pays basque Nord. L'entreprise est d'importance : la société, basée à Andoain, emploie 150 personnes dont environ 80 à 90 journalistes et dispose de correspondances à Bilbao, Vitoria, Pampelune et Bayonne où travaillent 3 journalistes. Berria reçoit le soutien financier de la Communauté autonome d'Euskadi. Ses colonnes abondamment illustrées (couverture en quadrichromie) couvrent l'actualité politique, économique, sociale, sportive et des sujets sur l'éducation, la littérature, la création, l'environnement, et marquent son ancrage dans la société contemporaine.

Berria publie également deux suppléments hebdomadaires : un le mercredi, destiné aux jeunes et aux étudiants, est consacré aux loisirs et aux préoccupations des jeunes : nouvelles technologies, sports, sexualité et un 16 pages le samedi pour les enfants, fréquemment utilisé comme support pédagogique dans les écoles.

Entretien avec Eneko Bidegain, chef de la rédaction de Bayonne de Berria

1. Quel est votre point de vue sur la situation de la langue basque ?

Je suis assez pessimiste, concernant le Pays basque Nord. Sur la côte basque, la langue basque est devenue anecdotique, totalement noyée par le français. Les locuteurs sont rares, notamment chez les jeunes, et les occasions de vivre en basque sont quasiment nulles. La langue basque na pas de place dans la rue, ou alors cette place se cantonne souvent au niveau du folklore. Il suffit de voir l'attitude répressive de la SNCF face à des jeunes qui réclament, sans violence et avec humour, l'utilisation de la langue basque dans les gares du Pays basque. L'enseignement basque se heurte chaque année à un problème de postes d'enseignants. Et cette année le problème n'est toujours pas réglé. Cette vie quotidienne nous montre que les pouvoirs publics n'ont pas de réelle volonté politique de sauver la langue basque. Les belles paroles auxquelles les grands élus nous ont habitués ne sont, à mes yeux, que de la poudre aux yeux, tant qu'une vraie politique linguistique avec des moyens suffisants ne sera mise à disposition.

2 . Quelle est votre audience en Pays basque français ?

Il nous est difficile de connaître exactement notre audience, mais nous évaluons notre lectorat à plusieurs centaines de personnes. Cependant, malgré une audience relative, nous cherchons à être un journal référent au niveau de l'actualité politique, sociale et culturelle du Pays basque Nord.

3. Pourquoi le quotidien Berria est-il important pour le rayonnement de la langue et la culture basques ?

La normalisation de la langue basque passe aussi par les médias, vu leur importance dans nos sociétés. Le quotidien Berria montre tous les jours, tout comme la télévision basque Euskal Telebista et les radios bascophones, que la langue basque est une langue moderne et que nous pouvons suivre l'actualité en basque. Berria donne la possibilité de lire tous les jours en basque, de vivre en basque et d'enrichir cette langue. Ce n'est pas un symbole. Nous contribuons au développement et à la diffusion de cette langue. Grace à Berria, la langue basque gagne du terrain et affirme sa place et sa maturité, auprès des autres langues comme le français ou l'espagnol. 

Entretien réalisé par Catherine Lefort