Koldo Amestoy (1952, Arraute) véhicule aujourd'hui la tradition orale du Pays Basque à travers le monde. Puisant dans les recueils de contes traditionnels, il les met au goût du jour et en crée de nouveaux. Il présente Biribilketa, son nouveau spectacle inspiré de la danse du même nom, le 30 mars 2011 à Koldo Mitxelena (Saint-Sébastien), dans le cycle "Iparraldea Bertan !".
Avec le théâtre j'ai en quelque sorte trouvé une thérapie à ma timidité, mais j'ai aussi appris à appréhender le public.
Je suis né à Arraute, petit village situé entre Saint-Palais et Bidache, il y a 57 ans. Mon père était fonctionnaire des Ponts et Chaussées, et ma mère, au foyer. J'ai suivi mes études à Saint-Palais, puis à Anglet en tant que technicien du bâtiment. À 17-19 ans, j'ai effectué, comme ouvrier, plusieurs métiers : maçon, charpentier, ...
C'est au même moment que toute mon histoire a commencé. Je suis quelqu'un de timide. Au lycée, un ami m'a amené au club de théâtre. Pensez ! Je ne savais pas ce qu'était le théâtre ! Je me suis investi à fond dans ce monde, et je me suis régalé. J'ai en quelque sorte trouvé une thérapie à ma timidité, mais j'ai aussi appris à appréhender le public.
Comme il fallait vivre, je me suis installé à Hasparren comme dessinateur dans le bâtiment. Tout en travaillant, j'ai suivi divers stages (théâtre, danse africaine, chant, etc.) par plaisir et par curiosité, avec l'envie d'approfondir le travail de scène.
Dans les années 1980, j'ai été pendant deux ans responsable d'AEK (cours de basque pour adultes) pour le Pays Basque nord. Nous avons, avec les collègues de Bilbao, créé l'association AEK. J'ai aussi animé une émission en basque sur Radio Adour Navarre, première radio libre en Pays Basque nord. C'est là que j'ai commencé à conter.
Petit à petit, je suis devenu marionnettiste, puis conteur. Un conte est structuré avec introduction, histoire et fin. Je trouvais là matière pour le spectacle de marionnettes. Après avoir abandonné les marionnettes, il me restait le conte. J'ai alors commencé à étudier le conte, la psychanalyse des contes de fées, et à devenir conteur.
Un conte, c'est un paradis, un lieu particulier, un trésor.
J'ai raconté mon premier conte dans un camp d'été, à Bidarray. J'avais 25-26 ans.
En 1983, j'ai participé au festival des conteurs du monde en Dordogne. J'y ai rencontré des conteurs venant d'Égypte, d'Afrique. Je me suis rendu compte qu'ils se produisaient devant les adultes. À l'époque, le conte était pour moi destiné aux enfants. Je m'y produisis, en français pour la première fois, tant bien que mal. Je n'avais jusqu'alors raconté qu'en basque. Peu à peu je me mis à utiliser les deux langues. Je me rendis compte que chacune d'elles exigeait un travail particulier. Cette année-là, je décidai de devenir conteur professionnel.
Pour suggérer un personnage, nous n'entrons pas dans les détails. Une fois la silhouette dessinée, le public l'habille à son goût.
Pour moi, un conte, c'est un paradis, un lieu particulier, un trésor. Certains paradis et jardins sont, pour moi, des perles précieuses. Le conte a sa propre nature, sa fonction, parfois cachée, peut-être parce qu'il a été maintes fois raconté.
Lorsque je raconte une histoire, mon imaginaire est rempli d'images. Tout en les commentant, j'en invente de nouvelles. Chaque personne a ses propres images. C'est à nous de laisser au public le soin et le temps de les façonner. Il nous interpelle : "Ah merci ! Vous nous avez laissé dans nos rêves !". Pour suggérer un personnage, nous n'entrons pas dans les détails. Une fois la silhouette dessinée, le public l'habille à son goût. Pour cela, le silence est important dans un spectacle.
Nous redonnons vie aux contes, souvent endormis dans des livres.
Je crée, j'invente des contes qui viennent se mêler aux histoires plus anciennes.
Le conte a en lui-même, (ou nous le lui donnons), un rythme particulier. Cette ambiance suscite l'envie de le prolonger avec un musicien ou un chanteur, à travers un travail en commun.
Par exemple, pour le spectacle In vino fabula, j'ai rassemblé des textes se rapportant au vin, que j'ai ensuite adaptés. Avec le chanteur Pantxix Bidart, nous avons écrit des poèmes et nous avons réfléchi à l'articulation du texte avec la musique. Ce travail en binôme donne une grâce particulière au spectacle, tout en laissant la place à l'improvisation et au plaisir de jouer.
Le symbolisme est pour moi très important, parce qu'il m'aide. Ces forces et ces signes qui nous ont été perpétués jusqu'aujourd'hui doivent être transmis vivants.