A l'occasion du Championnat des bertsolaris du Pays Basque 2009, Joana Itzaina (1981, Itxassou) a présenté la joute du quart de finale d'Ustaritz, le samedi 17 octobre. La jeune labourdine participe pour la première fois, en tant que modératrice et meneur de joute, à ce grand rendez-vous de l'improvisation versifiée, organisé tous les quatre ans.
Joana Itzaina, née à Itxassou en 1981, est orthophoniste à Ispoure et vit à Cambo. Membre de l'association "Bertsularien lagunak" (les amis des bertsularis), elle est par ailleurs cofondatrice de l'école de bertsularisme pour adultes de Saint-Jean-Pied-de-Port. Après une courte expérience en tant que juge, elle officie à présent dans la préparation des sujets (rôle de modérateur de joute) et l'animation des joutes (rôle de meneur de joute). Voici quelques extraits de l'entretien qu'elle nous a accordé au mois d'août 2009.
J.I. : Il me semble qu'en naissant, je suis entrée au même instant dans le monde du bertsularisme : l'ambiance de la maison en était imprégnée, et nous prenions part aux joutes les week-end. Mon père (Mixel Itzaina) était juge, meneur de joute, bref un passionné. Je garde surtout les souvenirs des joutes : toute la famille s'y rendait, mon père y participant souvent en tant que juge. Même si j'étais petite pour tout comprendre, je me suis prise au jeu.
J.I. : J'ai commencé, il y a 4-5 ans : chaque année à Itxassou, la Gau eskola (association dispensant des cours de basque aux adultes) et un groupe d'amateurs de bertsus organise une joute. Ils m'ont demandé de prendre part à la préparation des sujets et à la coordination de la manifestation. J'ai ensuite présenté une finale du Trophée Hernandorena (concours récompensant les meilleurs jeunes bertsularis du Pays basque).
J.I. : Je suis devenue membre de l'association « Bertsularien Lagunak », il y a 4-5 ans. Elle m'a proposé une formation de juge. Après avoir suivi ce stage et une brève expérience en la matière, j'ai choisi la modération et la préparation des sujets. Nous avons suivi des cours avec Asier Ibaibarriaga de Bersozale Elkartea. Et puis, comme toute chose, on apprend en pratiquant.
J.I. : Il y a eu par le passé des écoles de bertsus, en particulier celle de Mauléon qui a donné bon nombre de bertsularis, juges, meneurs et amateurs des vers improvisés chantés. Nous avons créé l'école de Garazi, il y a deux ans, pour apprendre à versifier. Nous étions un petit groupe. Notre but n'est pas de participer à des championnats, mais d'être capable de chanter des bertsus à l'occasion d'une fête ou entre amis. Cette expérience est très intéressante et permet de mieux appréhender les fonctions de juge, si vous êtes juge, ou celles de meneur de jeu. En se mettant soi-même à la place du bertsulari, on ne voit pas les choses pareil.
J.I. : Au début, j'étais assez hésitante, mais la proposition était belle, alors pourquoi ne pas essayer ? Nous venions de vivre l'expérience du premier Championnat au Pays Basque Nord (fin 2008) et nous avons continué dans la lancée. Le groupe des modérateurs est assez jeune ; par rapport à moi tous ont une grande expérience, mais j'apprends beaucoup et c'est vraiment bien.
J'ai pris le train en marche, le groupe a commencé à se réunir en avril-mai 2009, je les ai rejoints le 30 mai. Nous nous sommes réunis d'abord une fois par mois et à présent chaque semaine, sans compter bien sûr les phases du concours.
J.I. : Nous préparons les sujets sans savoir qui les aura. En même temps, nous nous posons toujours la question : Est-ce qu'un jeune peut improviser sur ce sujet ?. S'ils prennent part au Championnat, nous pensons qu'ils sont prêts à chanter à partir de tous les thèmes. C'est, je dirais, une des différences avec une joute classique.
J.I. : Les organisateurs se sont réunis avec les improvisateurs, en particulier le jour du tirage au sort des phases finales ; depuis, une autre réunion a été organisée. Ils ont eux aussi leur mot à dire dans l'organisation du Championnat.
J.I. : Je pense que le fait d'élargir le thème des sujets proposés a été source d'enrichissement. De plus aujourd'hui, les participants sont de plus en plus nombreux. La qualité des joutes a augmenté ainsi que les possibilités d'improvisation. En revanche, au même moment, on exige trop d'eux : les bertsus improvisés aujourd'hui relèvent presque de celle de la littérature écrite ce qui implique que les bertsularis mettent beaucoup de temps à improviser. On perd un peu de cette spontanéité propre aux joutes.
A présent, il me semble que la tendance a changé : le thème devient plus cadré. Il est bon aussi de garder une certaine spontanéité, même s'il est agréable d'entendre de beaux vers bien élaborés. C'est difficile de trouver l'équilibre entre les deux. Voilà encore une des différences avec les joutes de place. Les improvisateurs eux-mêmes se mettent de la pression : ils veulent chanter dans des airs très longs, et le résultat n'est parfois pas probant. Les choses simples ont aussi leur charme.
J.I. : Personnellement, j'ai plus de goût à participer aux joutes de place. Mais, en même temps, j'estime que l'on apprend plus en préparant un championnat, en voyant les bertsularis et en appréciant leur prestation. Par ailleurs, la préparation des sujets engendre des frustrations : les idées foisonnent. J'aime ensuite en proposer certaines pour les joutes classiques. Participer au groupe des modérateurs est une véritable aventure : nous nous retrouvons souvent, des heures et des heures. Etant dans le cadre du Championnat, nous nous censurons nous-mêmes. Et nous projetons toujours d'organiser, un jour, une joute pour proposer tous nos fantasmes.