Le chant en Soule

Les Basques des autres provinces nous disent – et ils ont raison – « Vous les Souletins, vous êtes toujours en train de chanter ! » ou alors « Vous êtes encore Basques grâce au chant ». Il me semble plus que jamais qu'ils disent vrai. Par exemple, il est exact que les chansons d'Etxahun Topet ont donné un nouveau souffle au chant, du XIXe siècle à nos jours, que ce soit dans le domaine satirique ou dans l'expression de tous les tourments de l'homme. Dans les campagnes, l'on chantait ces couplets incomparables au coin du feu, avec émotion. Et que ce soit dans les repas ou dans les bistrots, les vers écrits par ce grand poète étaient commentés pour leur finesse ou pour leur habileté. L'on peut dire globalement que le chant est ici un des piliers de la langue basque.

En Soule, il y avait en gros trois écoles de chant.
D'abord celle de Barcus-Esquiule, que ce soit en solo dans les chants d'Etxahun ou en groupe dans les vieilles et admirables chansons souletines. Il faut ajouter que l'écho du chant pyrénéen résonne très fort ici. Les Eskiular chantaient tout aussi bien en basque qu'en béarnais !
Vient ensuite l'école de Haute Soule : celle de Larrau, de Sainte-Engrâce et de l'Ibar Eskuin (Val Dextre). A n'en pas douter, l'on se retrouve ici au coeur de la chanson souletine. Les chanteurs les plus savants de ces contrées connaissaient dans le moindre couplet la plupart des chants basques existant à leur époque. Ils avaient chacun leur auberge à Tardets et les soirs de marché ces bistrots n'étaient pas assez grands pour contenir tous ces chanteurs et tous ceux qui venaient les écouter. C'étaient des interprètes qui maîtrisaient le mieux la si belle façon de chanter des Souletins : le quart de ton, le chant modal, les changements de tons… Je les comparerai à la phénoménale Maurizia d'Arratia (province de Biscaye). Enfin, celle des Arbailles. Celle-ci se manifestait essentiellement dans les basa ahaide ou chants sans paroles. L'homme et la nature ne font qu'un depuis la nuit des temps dans le secteur d'Ahüzki. Ici comme ailleurs, les oiseaux ont fasciné les hommes, notamment le choucas ou l'aigle. Les Santa Graztar (habitants de Sainte-Engrâce) appelaient d'ailleurs ces basa ahaide "les airs d'Aussurucq". 

Jean Mixel BEDAXAGAR