Histoire de rythme

Les bertsularis emploient principalement cinq formes de "mesures" dans leurs improvisations.

  • Zortziko handia
  • Zortziko ttikia
  • Hamarreko handia
  • Hamarreko ttikia
  • Bederatzi puntukoa

D'autres formes rythmiques moins classiques, plus ou moins utilisés existent.

Zortziko handia et Zortziko txikia

Zortziko handia (prononcez "sortsiko handia") ou Zortziko txikia (prononcez "sortsiko tchikia") sont les formes métriques les plus utilisés, la strophe comprend 4 vers. 

Zortziko handia

L'on appelle Zortziko handia un vers composé de 18 syllabes, avec deux césures obligatoires : la première, après la cinquième syllabe, la deuxième après la dixième syllabe. Les huit dernières syllabes peuvent être "groupées" différemment.

Manex  gaztea lerden ederra  eskuan  mizpir  makila
Jean, homme jeune, svelte et beau, un bâton de néflier à la main


Ma-nex  gaz-te-a  /  ler-den  e-de-rra  /  es-ku-an  miz-pir  ma-ki-la
1     2        3   4    5 /     6    7      8  9  10   /     1   2    3       4     5     6    7   8

Manex gaztea, lerden ederra, eskuan mizpir makila, 
Zuberoako mendi mendian dabil kasko goren bila...
Leize zilorat lerratu eta, gelditu da seko hila!
Horra zergatik, pena dolorez, mintzalu zaigun ezkila.

Jean, homme jeune, svelte et beau, un bâton de néflier à la main,
Faisait de la montagne, en Soule, fixant les plus hauts sommets.
Il a glissé. Tombant dans un gouffre, il a été tué sur le coup. 
Voilà pourquoi, la cloche nous exprime sa peine et sa douleur.

 

Zortziko txikia

Dans cette forme, le vers contient 13 syllabes. Il n'y a qu'une seule césure, toujours après la septième syllabe. 

Zer-ga-tik a-ri zai-gun / ni-ga-rrez ez-ki-la
1     2    3  4   5   6     7    /   1  2      3     4   5   6 

Zergatik ari zaigun, nigarrez ezkila?
Manex gazte lerdena, eskuan makila
Mendiz mendi dabil, kasko goren bila
Zilorat eroririk, gelditu da hila!

Pourquoi la cloche pleure-t-elle ?
Jean, jeune homme svelie, un bâton à la main,
Faisait de la montagne, fixant les plus hauts sommets...
Tombé dans un trou, il s'est tué !

Hamarreko handia et Hamarreko txikia

Deux autres métriques assez employées. Dans le premier cas, il s'agit d'un vers de 18 syllabes ; dans le second, de 13 syllabes.

Hamarreko se distingue du Zortziko par la longueur de la strophe : cinq vers au lieu de quatre.

En voici deux exemples :

Bertsu de Xabier Amuriza (" Aita izena")

Aita nuen nik umoretsua, inoiz, geza ta gazia,
Harek agertu zidan bidea, baitzen bertsoz ikasia ;
Oi ene aita, nire egunak ere aurrera doaz ia,
Baina zugandik hartua baitut bertsutarako grazia,
Nik egingo dut arbola haundi zuk emandako hazia!

Mon père avait de l'humour, parfois son aigreur perçait sa douceur.
Il m'enseigna l'art d'improviser, car c'était un connaisseur !
0 mon père, à mon tour, je vois avancer l'heure...
Et puisque de vous, j'ai obtenu la grâce d'être improvisateur,
Je ferai de votre semence, un arbre de grande hauteur !

Bertsu de Mattin (Martin Trecu)

Bestakari izan naiz Arbonan bazkaltzen,
Ate leihoak hetsirik, trankil joana nintzen...
Kantu zahar ta bertsu, orotarik bazen ;
Ordu hartan ez nuen, ez segur pentsatzen,
Norbait ari zaitzala etxe arroatzen!

Portes et fenêtres bien closes dans ma maison,
Je partis tranquillement déjeuner aux fêtes d'Arbonne...
Chants traditionnels, bertsus... il y avait de tout...
A cet instant-là, je ne pensais point
Qu'un cambrioleur me dérobait mes biens !

La strophe dite de "9 points" : Bederatzi puntukoa

Xalbador. Championnat de bertsularis du Pays Basque. Saint- Sébastien,1967. (cc by-sa Fondo marin, Paco Mari)
Xalbador. Championnat de bertsularis du Pays Basque. Saint- Sébastien,1967. (cc by-sa Fondo marin, Paco Mari)
Nous puiserons chez Xalbador, dans son mémorable "Mattin nigarrez ikusi dut" ("J'ai vu Mattin en pleurs"), un couplet à 9 points, parmi les huit qu'il composa à cette occasion.

Euskal haurrak etxetik urrun joaitea
da mendeak dakarren ezin-bestea;
jakinik baduela zorion-partea,
hura ezin bilatuz dabila gaztea ;
gure gizartea, herria, etxea,
semetaz hustea, Zer gauza tristea!
Urrikal zakizkigu, Jainko maitea
!

Que les enfants basques partent loin de chez eux :
c'est notre siècle qui les y oblige.
Sachant qu'il a droit à sa part de bonheur
le jeune est à sa recherche.
Quelle tristesse que de voir notre société, notre pays, notre maison
se vider de ses fils !
Dieu aimé, prends pitié !

Punttuka et hitz muturrak

Le jeu du punttuka est très apprécié par les bertsularis eux-mêmes. Cet exercice leur permet de "respirer" un peu. Il s'agit de faire une ou plusieurs strophes entre 2, 3 ou 4 bertsularis, chaque improvisateur ne chantant qu'un vers à la fois.
Par contre, quand il s'agit des "Hitz muturrak" cela se complique.
L'animateur propose à chaque bertsulari quatre mots avec la même consonance finale.

Exemple : indar - oldar - abar - lapar ou en français : maison - foison - conjugaison - poison.

Le bertsulari doit spontanément composer une strophe en respectant obligatoirement ces quatre mots et en argumentant de sorte que le contenu soit cohérent.

Parfois, l'animateur chante le premier vers et le bertsulari improvise les trois, voire les quatre autres pour faire une strophe comme l'illustre cet archive sonore.

Bertsus de Xalbador interprétés par Xabier Amuriza
Premier vers donné par le meneur de jeu : "Gauaz eta egunaz beti ametsetan..." ("De jour comme de nuit toujour rêveur...")
Format Realplayer (174 ko)